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Télétravail, au-delà de la mode

jeudi 22 mars 2012, par Journal de la Corse

Le télétravail a le vent en poupe. A l’heure où tout le monde réclame de la flexibilité, une meilleure gestion du temps et des ressources, ainsi que des réductions de coût, cette organisation « délocalisée » du travail à l’heur de plaire. Même le gouvernement s’y met et le prône pour lui-même. Avec un levier imparable : l’entrée du télétravail dans le Code du travail. S’il fait son trou dans le livre rouge, alors…

Revue d’avantages

Sans tomber dans l’optimisme béat, le télétravail, qui soit continu ou partiel, cumule quelques avantages non négligeables : flexibilité des ressources humaines y compris en faveur des travailleurs handicapés ou de ceux ayant des contraintes familiales fortes, réduction de l’absentéisme et des retards puisque réduction des temps de transport, flexibilité des horaires de travail, gain en autonomie et responsabilité, réduction des frais généraux. Et les inconvénients ne sont pas totalement absents non plus : problèmes techniques, éloignement, sentiment d’isolement, confusion entre vie privée et vie professionnelle, affaiblissement du collectif de travail, vulnérabilité des travailleurs face au stress au travail, gestion du temps de travail plus aléatoire (horaires, durée…), gestion plus compliquée de la carrière, complexité du management avec des salariés à distance accès aux logiciels à distance, protection des données, etc. Des freins qui pourraient expliquer aussi pourquoi cela peine à décoller. Selon une étude de la DARES, seulement 2% des salariés français pratiquent le télétravail à domicile, et 5% le télétravail nomade. Dans la majorité des cas, les télétravailleurs sont des actifs qualifiés (cadres) et exercent dans les secteurs d’activités suivants : informatique, services aux entreprises, banques et assurances. Dans les TPE et les PME, notamment, le télétravail ne prend pas : seules 15% des sociétés de 10 à 19 salariés le pratiquaient en janvier 2008, contre 27% des entreprises de 20 à 249 salariés et 65% de celles qui comptent plus de 250 salariés.

Accords et désaccords

Pour qu’il soit accepté par tous, employés comme employeurs, législateurs comme citoyens, le télétravail a été cadré. Le Ministère de l’Économie, des Finances et de l’Industrie a mis à disposition un Accord cadre européen sur le télétravail, qui liste des droits et les devoirs de l’employeur et du salarié dans le cadre du télétravail. Le 19 juillet 2005, un Accord National Interprofessionnel (ANI) a été signé sur le télétravail salarié. Aujourd’hui, la loi Warsmann adoptée le 29 février dernier définit les obligations des employeurs vis-à-vis des salariés travaillant depuis leur domicile. Le télétravail doit être volontaire et réversible : l’employeur doit préciser les conditions de retour à une exécution du contrat de travail sans télétravail et donner priorité au salarié souhaitant réintégrer les locaux si un poste correspondant à ses qualifications et compétences se libère. Ces grandes lignes seront précisées par décret. La balle est dans le camp du conseil constitutionnel qui a été saisi le 5 mars, par des députés et sénateurs du groupe socialiste, radical et citoyen, pour un contrôle de constitutionnalité de cette la loi. Le télétravail, enjeu électoral ?

Enjeux multiples

L’écobilan ne serait pas aussi glorieux pour les NTIC… Néanmoins, le télétravail a des incidences environnementales positives, ne serait-ce que parce qu’il permet de réduire les dépenses liées aux transports (carburant, parking, assurances, temps perdu, etc.). Il touche également l’immobilier, puisque les entreprises peuvent avoir des locaux moins grands, donc gaspiller moins de matière et d’énergie. Des gains sont attendus du télétravail : moins de pollution liée aux transports, meilleure productivité, équilibre vies privée et professionnelle… Malgré tous ces bénéfices avancés, le télétravail décolle peu, même en Corse où la géographie et le tissu économique favoriseraient ce type d’organisation. Les freins culturels restent forts, le « présentéisme » étant bien ancré, de même que le temps passé à la tâche, plus que la mesure des objectifs atteints. Seulement une cinquantaine d’entreprises ont passé des accords favorisant le télétravail. Pour aider les entreprises à se lancer, l’Observatoire sur la responsabilité sociétale de l’entreprise a publié un guide du télétravail publié le 16 décembre dernier. Selon le Centre d’analyse stratégique (CAS), le télétravail doit pourtant concerner jusqu’à 40 à 50% des emplois dans dix ans. Alors, on s’y met, ou pas ?

Maria Mariana

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