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Émeutes à La Réunion contre la vie chère

jeudi 1er mars 2012, par Journal de la Corse

Des affrontements entre groupes de manifestants et forces de l’ordre se sont produits dans la nuit du 21 au 22 février dans un quartier de l’est de Saint-Denis, le chef-lieu de l’île de La Réunion, et dans la ville du Port (nord-ouest de l’île). Mercredi 22 février, de nouveaux troubles ont éclaté au Port et au Chaudron, à Saint-Denis pour protester contre la chèreté de la vie. Le risque est celui d’un embrasement généralisé.

Total grand distributeur du carburant réunionnais

Des dizaines de commerces ont été pillés ou saccagés dans plusieurs villes de la Réunion rappelant les émeutes qui avaient déjà éclaté il y a trois ans au Chaudron à l’issue d’une manifestation du Cospar (Collectif des organisations syndicales, politiques et associatives). C’était à l’époque des troubles contre la vie chère en Guadeloupe organisé par le LKP. Ces incidents ont éclaté à l’issue du blocus de l’entrepôt la SRPP (Société réunionnaise des produits pétroliers) unique lieu de stockage de carburant de la Réunion, par des transporteurs. Toute la matinée de mardi, le leader du mouvement, Jean-Bernard Caroupaye, président de la FNTR (Fédération nationale de transport routier) avait appelé la population à venir soutenir sur place l’action des transporteurs contre la cherté du prix de l’essence et la vie chère. On notera que le prix moyen du litre de sans-plomb est à la Réunion le même qu’en Corse (1,66 euro avec une pointe de 1,69 euro dans l’extrême sud corse). Mais à la Réunion c’est la société Total qui détient la quasi-exclusivité de la distribution sur le pourtour de La Réunion.

Une situation sociale désastreuse

Dans cette île située au large de l’Afrique, le coût de la vie est environ 40% plus cher qu’en métropole et le marché de l’emploi est dominé par les commandes faites par les services publics. 52% des Réunionnais vivent en dessous du seuil de pauvreté et le chômage (30%) n’a cessé d’augmenter. En 2011, le nombre de saisines du tribunal de commerce pour des entreprises en difficulté a progressé de 76% (800 contre 455 en 2010). Dans ce contexte sinistré, aggravé par l’enchérissement mondial des denrées alimentaires de base, la majorité des emplois proposés sont des CDD de 6 à 10 mois déployés en saison touristique pleine. De surcroît, la prime de vie chère de 40% octroyée aux fonctionnaires n’a fait que creuser les inégalités entre Réunionnais mais aussi entre locaux et "oiseaux des îles" ces fonctionnaires métropolitains qui passent d’île en île afin de profiter au maximum du système postcolonial.

La tentation d’extrême-droite

La Réunion a toujours abrité un électorat d’extrême-gauche dominé par l’atypique Parti communiste réunionnais mené par l’indestructible Paul Vergès, frère Jumeau de l’avocat Jacques Vergès. Pourtant la paupérisation de la population réunionnaise fait craindre la tentation du vote Front national aiguillonné par une forte présence immigrée notamment comorienne sur le marché du travail local. Les partis locaux, équivalents de nos clans, sont dénoncés par les comités de chômeurs. Ils sont accusés de favoriser une politique « misérabiliste » avec pour objectif de récupérer les subventions de la métropole et de s’en servir pour se fabriquer une clientèle.

L’économie souterraine, poumon de La Réunion

Dans un pareil contexte, le travail non déclaré est devenu une activité dominante hors le service public. C’est évidemment une cause supplémentaire de chômage accentué par les problèmes de mobilité dans l’île, l’absence de qualifications spécifiques et la fin de la culture sucrière. Dans cette dynamique de tiers-mondisation qui rappelle celle qu’on rencontre à la périphérie du territoire dit national (TOM-COM), la situation est devenue explosive d’autant qu’aucune solution alternative n’est proposée par les partis politiques en place. De nouveaux troubles sont donc à prévoir et les escadrons du GIGN et du GIPN envoyés spécialement pour contenir la colère des Réunionnais n’y pourront pas grand-chose.

GXC

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