Le PADDUC proposé par l’exécutif de la CTC a emporté la majorité de l’Assemblée ce qui était un peu attendu. Ce qui l’était moins ce sont l’enthousiasme des nationalistes et de certains représentants de la société civile corse.
Un PADDUC offensif
Le PADDUC de l’exécutif se veut volontariste et juste. Il veut dessiner les contours d’une société plus juste qui tient du programme de l’actuel président de la République revue par le Front de gauche. Et pour cause… Maria Guidicelli en est sa conceptrice en chef. La ligue des droits de l’homme a salué le contenu du PADDUC sous le titre « Un vote prometteur » « Incontestablement, l’adoption par l’Assemblée de Corse d’un texte définissant les grandes orientations du PADDUC est une bonne nouvelle. La Ligue des Droits de l’Homme salue en particulier la référence au peuple corse dans ce document-cadre, le choix stratégique d’une économie des besoins, l’affirmation d’une société solidaire, un débat de qualité entre élus territoriaux toute tendance confondue et au final un vote largement majoritaire au nom de l’intérêt général. Beaucoup reste à faire. Le PADDUC devra notamment énoncer les conditions de l’égalité réelle pour l’accès aux droits et permettre de vivre dignement et de travailler en Corse. Désormais, sur la base du texte adopté, une alternative au mal développement et au sous-développement est possible. Pour cela, il sera nécessaire de prolonger et renforcer le processus initié avec les Assises du foncier et du logement. Pour dire les droits, il est indispensable d’associer à la délibération la société civile et les citoyens résidant durablement en Corse quelle que soit leur origine « . Les nationalistes de leur côté ont applaudi le texte et proposé la reprise de la notion de peuple corse (d’ailleurs utilisé par Maria Guidicelli dans son introduction) et espérer des avancées statutaires tout en insistant sur le sort des prisonniers. En définitive, il ne resterait plus qu’à franchir une étape : celle de l’acceptation de la majorité parlementaire nationale. Ce qui n’est pas rien. Reste un PADDUC offensif qui rappelle les bonnes résolutions des années 1990 quand Pierre Joxe proposait son projet pour la Corse. Il avait alors en face de lui outre une partie de la droite, la gauche “bleu, blanc, rouge” à laquelle appartenaient, soit dit en passant, les radicaux de gauche et le parti communiste qui ont évolué dans le bon sens. Il est vrai que depuis les clandestins ont perdu du poids au détriment des nationalistes modérés.
Quelques inconnues tout de même
C’est cependant, à mon avis “U Levante” qui a le mieux exprimé les faiblesses du projet dans un article intitulé « Le Padduc face-à-face avec les logiques du passé ». L’organisation écologiste écrit : « Les équilibres écologiques de cette planète sont à jamais perturbés et le point de non-retour est à court terme. C’est dans ce contexte inconnu qu’il faut prévoir l’avenir en imaginant les logiques du système économique, celui du système social. Nos élus, qui devront adopter ce schéma prospective, doivent accepter de changer de paradigme. Penser que demain les questions de l’accès à l’eau, à la nourriture, aux soins… seront des questions nouvelles et primordiales. Les discussions sur le foncier font écho à la donne nouvelle du changement climatique, du pic pétrolier… de la réalité d’un monde fini. Elles ouvrent des interrogations liées à la montée des eaux, aux migrations de populations à l’échelle mondiale, aux transports, à l’énergie. Ainsi, parmi les fondamentaux, le Padduc devra : promouvoir l’autosuffisance alimentaire et énergétique, viser un développement plus économe en énergie, prendre grand soin du patrimoine naturel et foncier. Veiller aussi à la sauvegarde des valeurs et culture qui font la structure d’une communauté humaine et lui permettent de garder une cohésion salutaire quand l’avenir est incertain. » Concluant « Nous attendons que les choix portés par le Padduc n’enferment pas le peuple de Corse dans une impasse ou dans des solutions de non-retour. Elles généreraient immanquablement des iniquités et des désordres sociaux ». U Levante rappelle que nous sommes aujourd’hui loin des logiques affectives des années 80. Bien que restant une île la Corse doit tenir compte du contexte mondial. Et les bonnes résolutions de gauche risquent de ne guère faire le poids face aux logiques des marchés et de la crise. Mais au moins ce PADDUC-là a-t-il pour ambition de favoriser pour la Corse et son peuple un avenir autonome et ne pas se réfugier dans un lamentisme victimaire. C’est déjà un pas immense de franchi vers une réelle maturité politique.
GXC