Le lundi 6 mars dernier, près de trois cent personnes ont assisté, au Palais des Congrès d’Ajaccio, a un débat-meeting initié par la Ligue des Droits de l’Homme et dont le but était de protester contre les juridictions d’exception. En toile de fond, "l’affaire" Guy Orsoni, où cinq personnes déjà, viennent d’entamer une grève de la faim...
Guy Orsoni a été mis en examen -il avait été mis en cause par des témoignages sous X- dans trois dossiers d’assassinats. Ceux de Thierry Castola, le 3 janvier 2009, Sabri Brahimi, le 19 janvier 2009 et la fusillade de Baleone, qui, le 10 avril 2009, avait coûté la vie à Nicolas Salini et Jean-Noël Dettori. Remis en liberté dans la troisième affaire, il reste, en dépit d’un dossier au sein duquel Maître Philippe Gatti, l’un de ses conseillers, affirme qu’aucun élément matériel ne peut être retenu à sa charge, incarcéré à la prison de Grasse, depuis trois ans. "Je suis prêt à tout pour prouver mon innocence, a précisé l’intéressé avant d’entamer une grève de la faim qui est entrée dans sa cinquième semaine. En Corse, devant le danger encouru par son fils, Alain Orsoni a décidé d’en faire de même. Bientôt suivi par Christian Leca, maire de Veru, Pierre-Jean Guidicelli, employé de l’ACA et Gabriel-Xavier Culioli, collaborateur dans nos colonnes et écrivain.
Sensibiliser l’opinion publique
Mais l’affaire a pris une autre tournure en début de semaine dernière avec, dans un premier temps, un débat-meeting qui s’est déroulé dans un Palais des Congrès copieusement garni. À la tribune, des personnalités de la société civile (parmi lesquelles Petru d’Orazio, enseignant, André Paccou, responsable de la Ligue des Droits de l’Homme, le père Gaston Pietri ou Léo Battesti, président de la fédération corse d’échecs) se sont succédé mais aussi des personnalités issues du monde politique (François Alfonsi, député, François Casasoprana et Tumasgiu d’Orazio, adjoints au maire d’Ajaccio...). Tous ont tenu à dénoncer vivement les pratiques des juridictions d’exception au cours d’un débat-meeting dont l’objectif avoué était, bel et bien, de sensibiliser l’opinion publique, d’alerter les médias et d’étendre le mouvement à la population. Même si, dans la salle, d’autres personnalités civiles et politiques avaient pris place, celle-ci s’était déplacée en masse. Ainsi, après "l’affaire Plasenzotti" où les méthodes de la JIRS avaient été pointées du doigt, une nouvelle mobilisation est en marche. "Je suis très lié d’un point de vue affectif, avec la famille Orsoni, explique Léo Battesti, mon soutien et mon investissement dans cette démarche relèvent, néanmoins, du domaine politique. Je suis catastrophé par l’atteinte aux libertés utilisées, à travers des méthodes d’un autre âge, par la JIRS. Les conséquences du mépris pour la séparation des pouvoirs et la présomption d’innocence ont et vont occasionner de nombreux drames humains. Ils sont par ailleurs contre-productifs dans la juste lutte contre le banditisme car enlevant toute légitimité à des magistrats se comportant comme des militants et non des hommes de loi." Le président de la Ligue corse d’échecs, qui a donné le coup d’envoi, vendredi dernier, de la rencontre ACA-OM, n’a pas manqué, au micro et devant 8000 spectateurs, d’évoquer, de nouveau, "l’affaire Guy Orsoni" et ses conséquences désastreuses.
Mobilisation en marche
Une mobilisation qui, désormais, s’intensifie afin de soutenir Guy Orsoni et de dénoncer la justice d’exception. Et, outre les grèves de la faim entamées par cinq personnes, le bras de fer avec les magistrats de la JIRS se poursuit. Une pétition (voir par ailleurs) a été lancée sur le web. Les premiers signataires y précisent qu’ils "ne se prononcent pas sur l’innocence ou la culpabilité éventuelle des personnes mises en examen (...). On se réfère au principe constitutionnel de la présomption d’innocence et au code de procédure pénale indiquant que la détention provisoire est l’exception. On s’associe contre les abus de police et les dérives vers l’arbitraire que génère cette justice d’exception. Nous revendiquons le respect du principe d’égalité de chaque citoyen devant la loi et l’abrogation des lois instaurant des régimes judiciaires d’exception." Enfin, Antoine Campana, grand-père de Guy Orsoni, Lieutenant-colonel en retraite a décidé, il y a une dizaine de jours, de restituer la Légion d’Honneur qui lui avait été remise il y a plus de quarante, parce que, dit-il, le traitement infligé à Guy est indigne d’une justice qui se dit impartiale. Je ne veux plus, pour ma part, être décoré par u Etat que ses pratiques n’honorent plus." Reste à savoir, désormais, face à une mobilisation qui s’étend à la population, à la détermination des grévistes de la faim, dont certains ont franchi le mois de jeûne, à l’appel lancé aux politiques, quelle sera l’attitude des magistrats de la JIRS...sachant que Lisandru Plasenzotti, détenu depuis quatre mois, a été transféré à Ajaccio et, qu’au terme d’une longue grève de la faim, Alain Orsoni avait finalement été libéré il y a deux ans, après de longs mois de détention préventive...
Joseph Albertini
Pétition :
www.petitions24.net/corse_ap...
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