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BD : URASAWA, roi du manga

jeudi 17 mai 2012, par Journal de la Corse

Aux Éditions "les moutons électriques" de Lyon vient de paraître le premier ouvrage en français consacré à la vie et l’œuvre de Naoki Urasawa. On le doit à Alexis Orsini, un jeune auteur originaire de San Nicolao, passionné de manga et admirateur du génial dessinateur et scénariste nippon.

Parce qu’il s’est imposé comme un incontournable de la bande dessinée japonaise, jusqu’à se voir couronné du titre de "monstre sacré" par la critique, Naoki Urasawa, digne "héritier" du grand Osamu Tezuka, a raflé tous les prix dans sa spécialité–rien qu’ en France, au festival d’Angoulême, « Meilleur scénario » en 2003 pour Monster, « Meilleure série » en 2004 pour 20th Century Boys, et « Intergénérations » en 2011 pour Pluto–parvenant à vendre en vingt-cinq ans plus de cent millions d’exemplaires de ses œuvres à travers le monde. Au début des années 1980, rien ne destinait pourtant l’adolescent Naoki à une carrière de mangaka. D’abord guitariste rock amateur et étudiant en économie, il aspire seulement à la vie de salarié, bien que félicité épisodiquement pour la qualité de ses dessins. C’est de la rencontre avec un éditeur clairvoyant, Takashi Nagasaki, que va naître son affirmation artistique professionnelle.

De "Pineapple Army" à "Billy Bat"

Première longue série d’Urasawa, "Pineapple Army" narre en huit volumes les aventures d’un américano-japonais qui, après avoir fait la guerre du Vietnam, vit à New York en tant qu’instructeur militaire : c’est l’occasion de traiter de la guerre, de la corruption, des ravages de la mafia. Puis vient le premier grand succès avec Yawara !, l’histoire d’une jeune fille que son grand-père, ancien judoka, souhaite voir lui succéder dans l’excellence de ce sport. Les thèmes du manga sportif se mêlent ici aux problèmes personnels de la jeune fille, recueillant de 1986 à 1993 un vaste intérêt populaire. Master Keaton, publié simultanément, est un thriller, cependant que Happy ! Qui voulait être un nouveau manga sportif vire au drame social, dominé par le sexe et l’argent. Nouveau thriller en 1994 avec Monster, situé en Allemagne, dont dix-huit tomes ont paru à ce jour. Suivront entre 1999 et 2004 20th Century Boys remémorant non sans émotion le Japon des années 1960-1970, Pluto dont le héros est un robot, et enfin Billy Bat, thriller historique.

Une vision du monde

Alexis Orsini ne se borne pas à rapporter en détail la genèse, les circonstances et le succès de ces monumentales séries, ni d’en résumer la trame–pour autant que cela soit faisable sans trop amoindrir l’intérêt. Son exhaustif essai, copieusement illustré, vise au delà de la biographie et de la bibliographie du mangaka, l’évocation d’une histoire beaucoup plus vaste. Car, ainsi que nous en sommes prévenus dès les premières lignes de l’ouvrage, « retracer le parcours de Naoki Urasawa, c’est aussi revivre les évolutions culturelles et historiques qui ont agité le globe des années 1960 à nos jours ». Il n’est effet aucun thème capital ayant affecté la société du dernier demi-siècle qui ne soit abordé par la plume et le crayon de ce prolifique auteur. Et celui-ci, qui se défend de délivrer des « messages » se révèle pourtant comme un formidable interprète du monde qui nous entoure.

Sylvain Fanucci

Alexis Orsini, Naoki Urasawa, collection "L’air du Temps", Lyon, les moutons électriques éditeur (www.moutons-électriques.fr) 2012, 250 pages, 23 euros

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